Baidu a fermement démenti, dans un communiqué publié lundi soir, toute collaboration avec des organisations militaires chinoises, après la diffusion d’un rapport suggérant un lien entre son intelligence artificielle générative et l’Armée populaire de libération (APL). L’article incriminé, paru dans le South China Morning Post (SCMP), s’appuyait sur une étude académique rédigée par des chercheurs d’un institut affilié à l’APL, qui citait le chatbot ERNIE Bot de Baidu comme outil capable de simuler des manœuvres tactiques ou d’anticiper les actions d’un adversaire à partir de données de combat. Le média avait initialement évoqué une « connexion physique » entre le géant technologique et l’armée, une formulation ultérieurement retirée de l’article.

La réaction de Baidu a été immédiate : l’entreprise a précisé que son modèle ERNIE Bot, utilisé dans l’étude, correspondait à la version grand public disponible depuis août, et non à une solution sur mesure développée pour des acteurs militaires. « Baidu ne fournit aucun service personnalisé à l’armée », a insisté le groupe, soulignant que ses technologies restent accessibles à tous, sans distinction de secteur. Cette clarification intervient dans un contexte de forte volatilité boursière, les actions de Baidu ayant enregistré leur plus forte chute depuis 2022 à la suite de la publication du rapport, reflétant les craintes des investisseurs quant à d’éventuelles implications géopolitiques ou réglementaires.

Le débat autour de l’utilisation civile ou militaire des technologies d’IA en Chine n’est pas nouveau, mais cet épisode met en lumière les tensions persistantes entre innovation technologique et contrôle étatique. Alors que Pékin encourage activement le développement de l’intelligence artificielle – le pays abritant désormais 15 % des entreprises mondiales du secteur, pour une valeur marchande dépassant les 900 milliards de yuans –, les suspicions de collusion entre les géants du numérique et les institutions militaires alimentent régulièrement les spéculations, notamment à l’étranger. Baidu, comme d’autres acteurs majeurs tels que Tencent ou Alibaba, se trouve ainsi contraint de naviguer entre les attentes du marché global et les impératifs de transparence imposés par un environnement géopolitique de plus en plus polarisé.

L’affaire rappelle par ailleurs les enjeux stratégiques liés à l’IA dans le domaine de la défense, où les capacités de modélisation et de prédiction offertes par des outils comme ERNIE Bot pourraient, en théorie, être exploitées pour des applications militaires. Toutefois, Baidu a réaffirmé sa position en tant qu’entreprise civile, sans lien contractuel avec l’APL, tout en profitant de l’occasion pour rappeler que ses avancées technologiques – comme la réduction des coûts des modèles multimodaux annoncée récemment par son concurrent Volcengine – visent avant tout des applications commerciales et grand public. La polémique, bien que rapidement étouffée, illustre la méfiance croissante envers les transferts de technologies entre les secteurs privé et public en Chine, un sujet qui continue de diviser analystes et régulateurs internationaux.