La création d’un agent autonome, bien que souvent évoquée comme une révolution pour les entreprises, reste un défi concret pour de nombreuses équipes qui peinent à en définir les contours ou à en mesurer la faisabilité. Ce guide propose une méthodologie structurée, illustrée par l’exemple d’un agent de gestion d’emails, pour passer d’une idée abstraite à une implémentation opérationnelle, en évitant les écueils courants.
La première étape consiste à définir précisément le rôle de l’agent en s’appuyant sur des tâches réalistes et circonscrites, comparables à celles qu’un stagiaire compétent pourrait accomplir. Il s’agit de sélectionner un périmètre ni trop ambitieux ni trop trivial, en listant entre cinq et dix exemples concrets pour valider la pertinence du projet et établir des critères d’évaluation futurs. Par exemple, un agent dédié aux emails pourrait être chargé de prioriser les messages urgents, planifier des réunions en fonction des disponibilités, ignorer le spam ou répondre à des questions produit à partir de documentation interne. Les pièges à éviter incluent un scope trop large, l’utilisation d’un agent là où un logiciel traditionnel suffirait (plus rapide et moins coûteux), ou l’attente de fonctionnalités irréalistes, comme l’accès à des données ou API inexistantes.
Une fois la mission clarifiée, la deuxième étape implique la rédaction d’une procédure opérationnelle standard (SOP), détaillant les actions qu’un humain effectuerait pour réaliser la tâche. Ce document permet d’identifier les étapes clés, les décisions critiques et les outils nécessaires, tout en confirmant que le problème est bien délimité. Pour l’agent email, cela pourrait inclure l’analyse du contenu et du contexte de l’expéditeur pour déterminer la priorité, la vérification des créneaux disponibles dans le calendrier, la rédaction d’une réponse adaptée, puis son envoi après validation humaine. Cette formalisation révèle les dépendances techniques (comme l’accès à un calendrier ou à une base de contacts) et affine l’architecture de l’agent.
La troisième étape se concentre sur la construction d’un prototype minimal (MVP) en ciblant d’abord les tâches de raisonnement les plus critiques, comme la classification ou la prise de décision, via un prompt bien conçu. L’idée est de tester ce prompt avec des données manuellement fournies (par exemple, le contenu d’un email et les informations sur l’expéditeur) pour évaluer sa capacité à produire des sorties cohérentes, comme identifier l’intention ("demande de réunion") et le niveau d’urgence. Des outils comme LangSmith aident à affiner le prompt, gérer ses versions et suivre ses performances sur différents scénarios. L’objectif ici est de valider la logique centrale avant d’automatiser les entrées ou d’ajouter des couches de complexité. Pour l’agent email, on pourrait commencer par perfectionner la classification des messages avant d’aborder la génération de réponses ou la planification.
Vient ensuite la quatrième étape, dédiée à l’intégration et l’orchestration, où le prompt validé est connecté à des sources de données réelles. Cela implique d’identifier les informations nécessaires (comme le contenu des emails, les disponibilités du calendrier ou les fiches produits) et de mettre en place les connexions techniques via des API ou des bases de données. Pour l’agent email, cela pourrait signifier relier le système à l’API Gmail pour lire les messages, à Google Calendar pour vérifier les créneaux, et à un CRM pour enrichir le contexte sur les expéditeurs. Une logique d’orchestration est alors développée pour enchaîner les étapes : déclenchement par un nouvel email, récupération des données contextuelles, passage de ces informations au prompt pour une analyse, proposition de créneaux si nécessaire, rédaction d’une réponse, puis envoi après relecture humaine. Cette phase transforme le prototype en un système fonctionnel, tout en révélant les limites ou les besoins d’optimisation.
Enfin, la cinquième étape consiste à tester et itérer rigoureusement. Les tests manuels initiaux, basés sur les exemples définis en amont, permettent de vérifier la justesse des sorties pour les cas d’usage principaux. Des outils de traçage comme LangSmith aident à visualiser le flux de décisions et à diagnostiquer les erreurs à chaque étape. Une fois cette phase validée, on passe à des tests automatisés sur un jeu de données élargi (plusieurs dizaines d’exemples) pour évaluer la robustesse de l’agent, définir des métriques de succès claires et identifier les faiblesses avant d’ajouter de nouvelles fonctionnalités. Cette approche itérative, combinant validation humaine et automatisée, assure une amélioration progressive de la fiabilité et de l’efficacité de l’agent.