Dans une intervention récente lors de la conférence True Tech Arch #7, Igor Morozov, architecte chez Platformeco, explore comment l’intelligence artificielle révolutionne les paradigmes traditionnels de l’intégration et de l’automatisation des processus métiers. Spécialiste de la méthodologie des Composable Enterprises (entreprises modulaires), développée en collaboration avec Google et Gartner, il souligne une transition majeure : l’évolution des systèmes automatisés classiques vers des agents IA capables de s’auto-optimiser en temps réel.
Morozov commence par rappeler que l’automatisation traditionnelle, basée sur des règles prédéfinies et des workflows statiques (comme les solutions iPaaS ou de gestion d’API), a longtemps permis de rationaliser des tâches répétitives. Cependant, ces systèmes atteignent leurs limites face à des processus complexes, dynamiques ou mal structurés, où les exceptions et les variables imprévisibles rendent les scripts rigides inefficaces. L’IA, en particulier les modèles génératifs et les agents autonomes, ouvre désormais la voie à une automatisation adaptive : ces agents peuvent analyser des données non structurées, prendre des décisions contextuelles et ajuster leurs actions sans intervention humaine, comme le feraient des experts métiers.
L’expert met en avant un changement de paradigme où la conception des produits IT ne serait plus réservée aux développeurs, mais accessible aux experts métiers eux-mêmes. Grâce à des interfaces conversationnelles (comme des copilots intégrés) et à des outils low-code/no-code enrichis par l’IA, ces professionnels pourraient modéliser des processus, tester des hypothèses et déployer des solutions sans écrire une ligne de code. Cette démocratisation pose cependant des défis majeurs : la qualité des données (indispensable pour éviter les biais ou les erreurs), la gouvernance des modèles (qui doit garantir la transparence et la conformité réglementaire), et la gestion des risques liés à l’autonomie croissante des systèmes.
Enfin, Morozov identifie des cas d’usage concrets où ces agents IA pourraient transformer des secteurs entiers. Par exemple, dans la logistique, des agents pourraient réorganiser dynamiquement des chaînes d’approvisionnement en fonction de perturbations imprévues (météo, grèves), tandis que dans la finance, ils optimiseraient des portefeuilles en temps réel en intégrant des signaux macroéconomiques. Néanmoins, il insiste sur la nécessité d’une approche hybride, combinant l’agilité des agents IA avec la supervision humaine pour les décisions critiques. Cette évolution, bien que prometteuse, exige une refonte des architectures IT vers des systèmes plus modulaires et interopérables, capables de s’adapter en continu aux besoins changeants des entreprises.