Les négociations entre Alibaba et ByteDance concernant l’avenir d’Ele.me, le service de livraison de repas détenu par le géant du e-commerce, se poursuivent sans qu’un accord ne soit encore trouvé, selon des informations relayées par le média financier chinois Caijing. Bien qu’Alibaba ait démenti être en pourparlers pour céder la plateforme, les discussions porteraient sur une offre de rachat formulée par ByteDance, maison mère de TikTok et de son équivalent local Douyin, évaluée à environ 7 milliards de dollars. Ce montant reste cependant inférieur de 500 millions à 1 milliard de dollars aux attentes d’Alibaba, ce qui constitue un premier point de blocage.

Un autre désaccord majeur concerne les modalités de la transaction : Alibaba souhaiterait transférer l’intégralité des équipes d’Ele.me, y compris les employés administratifs et techniques, tandis que ByteDance ne voudrait conserver que les livreurs, jugés essentiels pour renforcer son propre écosystème de services locaux. Cette divergence reflète des stratégies distinctes : Alibaba, qui a acquis Ele.me en 2018 pour 9,5 milliards de dollars dans le cadre de son expansion dans les services locaux face à Meituan, peine à rendre la plateforme rentable. ByteDance, de son côté, dépend actuellement de partenaires externes comme SF Express, Dada (filiale de JD.com) ou Ele.me pour assurer les livraisons liées à ses activités sur Douyin, et cherche à internaliser cette logistique pour accélérer son développement dans les services de proximité.

Le contexte économique et concurrentiel explique l’intérêt de ByteDance pour Ele.me. Douyin, qui a diversifié ses revenus au-delà de la publicité grâce au commerce en ligne et aux services locaux, voit dans la maîtrise de la livraison un levier clé pour réduire ses coûts et améliorer l’expérience utilisateur. Pour Alibaba, une vente partielle ou totale d’Ele.me pourrait s’inscrire dans une stratégie de recentrage sur ses activités les plus profitables, alors que la plateforme, malgré son importance stratégique, n’a pas encore atteint un cycle de rentabilité clair. Les négociations, si elles aboutissent, pourraient ainsi redessiner l’équilibre des forces dans le secteur chinois des services locaux, dominé par Meituan, en offrant à ByteDance une infrastructure logistique propre.

Les incertitudes persistent cependant quant à l’issue de ces discussions, d’autant qu’Alibaba a réitéré son démenti officiel. La valorisation d’Ele.me, en baisse par rapport à son rachat en 2018, reflète les défis auxquels fait face le modèle économique des plateformes de livraison en Chine, marked par une concurrence féroce et des marges réduites. Pour ByteDance, l’enjeu dépasse le simple rachat : il s’agit de s’affranchir des dépendances externes et de consolider sa position dans un marché en pleine expansion, où la rapidité et l’efficacité de la livraison deviennent des critères décisifs pour les consommateurs. L’évolution de ce dossier sera donc suivie de près par les observateurs du secteur technologique chinois.